Les engagements éducatifs de la section des Deux-Sèvres
Le violon de Marita, un conte de Noël estival
L'automne. Marita et Shota, un jeune couple, vit heureux en Géorgie. Fille de violoniste, elle est devenue premier violon dans plusieurs orchestres de son pays tandis que son époux est danseur dans plusieurs ballets nationaux. Et ils ont trois beaux enfants. Mais la dernière, la petite Viviana, est atteinte d'une maladie orpheline rarissime. Après de multiples contacts grâce à Facebook, ils décident d'aller en France où ils espèrent qu'une solution médicale sera possible.
L'hiver. Mais la réalité de la vie d'immigré loin de son pays les rattrape. Certes, l'hôpital de Poitiers prend en charge leur fille, à Niort, ils sont aidés pour se loger. Et Marita et Shota n'hésitent pas, l'une à jouer d'un violon ordinaire dans les bars et restaurants, lui à faire divers travaux, comme la maçonnerie. Si un 4ème enfant rejoint la famille, il leur manque toujours des "papiers".
Le printemps. Des dons les aident également et leurs enfants vont à l'école. Le hasard s'en mêle et se produisent alors plusieurs rencontres. C'est d'abord Georges Vallade qui vient d'acheter un vêtement rue Victor Hugo à Niort et qui, en sortant, entend un air joué au violon. Or il est musicien dans le groupe instrumental Amatini et est impressionné par la qualité musicale de la jeune violoniste qu'il découvre. Elle joue si bien "Belle", l'air de Notre Dame de Paris, qu'il est pris par l'émotion. Et ce ne sera pas la dernière fois avec Marita... Contact pris, Marita sera invitée à venir jouer avec Amatini lors de spectacles. Et, en juin dernier, une carte de séjour leur est délivrée par la préfecture.
L'été. Mais le hasard n'avait pas dit son dernier mot. Il se produit chez Christian Rault, le luthier renommé du Vanneau. Amatini souhaitait aider Marita à pouvoir jouer d'un violon digne de son talent. Or Christian Rault était dépositaire d'une copie d'un Guarnerius, le célèbre luthier italien du 18ème siècle aussi apprécié par les violonistes qu'un Stradivarius. Dominique Ruer, la propriétaire, l'avait hérité de son père qui souhaitait que son violon continue à être joué par des mains de qualité. Lorsqu'elle a entendu, au téléphone, Marita jouer un mouvement de l'été de Vivaldi, Dominique Ruer, elle aussi subjuguée par le talent de Marita, a alors consenti à ce que ce violon lui échoit, et en a aussi fortement baissé le prix. Georges Vallade et Amatini se sont alors mis en quête de donateurs pour la somme, encore élevée, qui restait à réunir, ce qui fut fait en moins d'un mois grâce à plusieurs dizaines de dons.
Dans l'atelier de Christian Rault a eu lieu fin juillet la fin provisoire de ce conte de Noël estival avec la remise par Dominique Ruer du violon à Marita. Et si l'émotion était palpable, elle le fut encore davantage lorsque Marita a interprété un extrait de "La liste de Schindler". Son archet maîtrisé d'une main talentueuse fit alors ressortir la profondeur sonore du Guarnerius, "son 5ème enfant", lâchera même, elle aussi émue, Marita.
Guy Brangier